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Melancholia


Voici une lecture analytique du poème de Victor Hugo "Melancholia" réalisée en classe de 1ère en français dans le cadre de la séquence "Écriture poétique et quête du sens, du Moyen Âge à nos jours"


Introduction

Victor Hugo (1802-1885): Chef de file du Romantisme, il a réalisé une oeuvre gigantesque qui touche à tous les genres. Que ce soit en poésie (Les Châtiments, Les Contemplations), en théâtre (Harnani, Ruy Blas), ou encore en roman (Les Misérables, Notre-Dame de Paris), Hugo s'engage dans de nombreux combats politiques, notamment dans la lutte contre les injustices sociales.


Les Contemplations (1856): Recueil de poèmes composé de deux parties, Autrefois et Aujourd'hui, séparées par la date de la mort de sa fille Léopoldine, noyée dans la Seine. "Melancholia" se situe dans la 2ème partie, et il s'agit d'un poème engagé contre le travail des enfants.

Lecture:

MELANCHOLIA

1 Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ? Ces doux êtres pensifs que la fièvre maigrit ? Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ? Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ; 5 Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement Dans la même prison le même mouvement. Accroupis sous les dents d'une machine sombre, Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre, Innocents dans un bagne, anges dans un enfer, 10 Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de fer. Jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue. Aussi quelle pâleur ! la cendre est sur leur joue. Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las. Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas ! 15 Ils semblent dire à Dieu : « Petits comme nous sommes, Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! » O servitude infâme imposée à l'enfant ! Rachitisme ! travail dont le souffle étouffant Défait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, œuvre insensée, 20 La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée, Et qui ferait - c'est là son fruit le plus certain ! - D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin ! Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre, Qui produit la richesse en créant la misère, 25 Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil ! Progrès dont on demande : « Où va-t-il ? que veut-il ? » Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme, Une âme à la machine et la retire à l'homme ! Que ce travail, haï des mères, soit maudit ! 30 Maudit comme le vice où l'on s'abâtardit, Maudit comme l'opprobre et comme le blasphème ! Ô Dieu ! qu'il soit maudit au nom du travail même, Au nom du vrai travail, sain, fécond, généreux, Qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux !


Problématique: Comment Hugo se fait-il ici le porte-parole de la cause des enfants?


Plan:

I.Une description réaliste et pathétique

1) La description physique des enfants

2) Des éléments réalistes

3) Une description pathétique


II.La dénonciation du monde du travail

1) L’allégorie du travail : un monstre

2) Des conditions de travail inhumaines

3) Les conséquences du travail


III.L’engagement du poète

1) Malédiction du travail

2) Un texte polémique

3) Un texte politique


I.Une description réaliste et pathétique

1) La description physique des enfants

champ lexical de la souffrance et de la maladie: "fièvre", "maigrit", "pâleur", "las", "Rachitisme"

insistance sur la jeunesse des enfants: "huit ans", "doux êtres"

v.1-3: caractérisation d'un groupe important: "tous ces enfants" suivi d'une négation: "pas un seul"→ pas d'exception possible

v.2: "pensifs"→ ont déjà des pensées d'adultes malgré leur jeune âge

v.3: "huit ans"≠ "seules"→ anormal pour un enfant de se promener seul

=Les enfants sont décrits comme des martyrs.


2) Des éléments réalistes

-Réalisme par rapport au temps de travail:

v.4-5: "quinze heures sous des meules", "aube au soir", "éternellement"→réalité possible à l'époque, les enfants ne voient jamais le soleil, la phrase semble s'allonger, rythme lent.

-Réalisme des méthodes de travail: "meules", "machines"

=Le réalisme accentue le pathétique.


3) Une description pathétique

Le registre pathétique est marqué par

-la ponctuation expressive (interrogations et exclamations)

-les apostrophes: "Ô dieu!", "Ô servitude!"

-le discours direct qui donne directement la parole aux enfants: v.15-16: "« Petits comme nous sommes,/ Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! »"

-de l'état de santé des enfants: "pâleur" + "cendre"→tout est terne, sans couleurs, en opposition avec le monde de l'enfance

=Le lecteur est ému par ces enfants.


II.La dénonciation du monde du travail

1) L’allégorie du travail : un monstre

Le travail est associé à un monstre→ allégorie

v.7: "accroupis sous"→ position d'infériorité " les dents d'une machine sombre"→ métaphore

v.8: "monstre hideux qui mâche"→ allitération en [m], ogre qui dévore les enfants

v.28: "donne une âme à la machine et la retire à l'homme"→ inversion des rôles, machine vivante


2) Des conditions de travail inhumaines

Le travail est répétitif:

v.6: "dans la même prison le même mouvement"→ parallélisme de construction qui marque la répétition de la tâche des enfants

v.10: "ils travaillent"→ rejet, mise en valeur

v.11: "jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue"→ parallélisme de construction, le travail est continu

v.9: "Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,"→double antithèse entre "anges" + "innocents" et "bagne" + "enfer"

gradation du lieu du travail: "prison"→"bagne"→"enfer"

v.10: "tout est d'airain, tout est de fer"→ parallélisme, travail très dur et froid

v.27: "Qui brise la jeunesse en fleur!"→métaphore et périphrase qui accentuent l'horreur du travail.


3) Les conséquences du travail

v.16: "ce que nous font les hommes"→ accusation des enfants

v.18: "souffle étouffant"→ être infernal

v.21: "Et qui ferait - c'est là son fruit le plus certain ! -"→incise de la part du poète

v.22: "D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !"→ antithèse: personne ne peut échapper aux méfaits du travail

v.23: "Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre"→métaphore: le travaile est assimilié à un oiseau de proie

v.25: "Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !"→ comparaison, article indéfini= généralisation

=Le travail a des conséquences néfastes.


III.L’engagement du poète

1) Malédiction du travail

v.29: "Que ce travail [...] soit maudit"→ malédiction de la part du poète

v.30-31: anaphore + comparaison à des références religieuses ("opprobre", "blasphème")


2) Un texte polémique

v.26: "Progrès dont on demande : « Où va-t-il ? que veut-il ? »"→questions rhétoriques: quelle est la réalité du progrès?

v.24: "Qui produit la richesse en créant la misère"→ antithèse, dénonce les prémices du capitalisme

v.28: "retire à l'homme"→déshumanisation des hommes en général (et plus que des enfants)

=Hugo utilise le registre polémique pour dénoncer le travail économique et non humain


3) Un texte politique

Hugo expose ses idées pour améliorer le bonheur des hommes: il s'agit d'un texte politique.

v.32: "au nom du travail même sain, fécond, généreux"→accumulation d'adjectifs positifs.

v.35: "qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux"→le "vrai" travail permet l'émancipation de l'homme

=Le poème se termine sur une note positive: le progrès est encore possible mais il faut changer la nature du travail.


Conclusion:

-bilan I, II, III

-réponse à la problématique: Hugo se fait le porte-parole des enfants grâce aux registres réaliste, pathétique et polémique présents dans ce poème. Il condamne le travail économique par rapport au travail humain.

-ouverture: On peut comparer ce poème à un autre de Victor Hugo, cette fois issu des Châtiments, "Souvenir de la Nuit du Quatre", où Hugo se fait le porte-parole des enfants tués lors d'émeutes provoquées par le coup d'État de Louis-Napoléon.


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